Sortie de route démocratique

Projet d'autoroute Machilly-Thonon - Itinéraire d’une forfaiture

 
 

Ce dossier n'aurait jamais dû avoir une résonance nationale. Comment en est-on arrivé là ?

Tout commence par une banale création d'un plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) concernant quelques communes de la rive française du Léman (le Bas-Chablais). Or, un projet d'autoroute, prévu sur le territoire, va consommer beaucoup de foncier et avoir des conséquences sur la vie des habitants. L'autorité environnementale régionale demande, comme on pouvait s’y attendre, une enquête sur l’impact du futur ouvrage pour chaque commune traversée et la Sous-Préfecture appuie cette demande. Contre toute logique, les élus locaux refusent d’obtempérer et décident de ne pas inscrire le tracé de l'autoroute dans les différents documents d’urbanisme. Une enquête publique a donc lieu pour le PLUi, sans mention de la principale infrastructure. Première sortie de route.

A la publication du PLUi, des associations locales réagissent et pointent du doigt la non-conformité de ce document d’urbanisme. Les élus locaux décident alors de solliciter deux sénateurs Les Républicains de Haute-Savoie pour déposer une proposition de loi permettant de couvrir ce forfait et régulariser l’illégalité. Le texte dit explicitement que puisqu'une Déclaration d'Utilité Publique (DUP) existe tout est en ordre. Deuxième sortie de route. 

A la fin de l'année 2022, tout s'accélère. La proposition de loi arrive en Commission Économie au Sénat et sera discutée le 25 janvier puis le 31 janvier en plénière. Cela veut donc dire que la majorité des membres de cette commission a accepté de discuter d'un texte douteux. Troisième sortie de route.

Conclusion

  • Les élus locaux de l'Agglo de Thonon se sont affranchis des remarques de l'Autorité environnementale régionale et de l'avis de la Sous-préfecture.

  • Les habitants restent dans le flou au sujet des conséquences de la future autoroute sur leur vie quotidienne.

  • Des sénateurs tentent une action de mise en conformité d'une décision inique et illégale.

C'est le processus démocratique qui est attaqué, car si la proposition de loi passe, des élus sur d’autres territoires pourront faire avaliser des projets sans débat démocratique. Un dossier local devient un enjeu national.

En savoir plus

—> Écouter l’interview de Jean-Pierre Burnet, co-président de l'ACPAT sur La Radio Plus


 
 

L’avis du Conseil d’Orientation des Infrastructures

Impact environnemental très élevé

A412 – Liaison autoroutière Machilly – Thonon-les-Bains

Extrait du Rapport du COI de décembre 2022

La DUP a été prononcée en 2019. Des recours fondés notamment sur la concurrence apportée par ce projet au Léman-Express ont été repoussés, mais le projet reste l’objet de fortes contestations en France comme en Suisse.

La procédure d’appel d’offre de concession a été engagée par les services de l’État en 2021 afin de désigner en 2023 le futur concessionnaire de l’infrastructure.

L’impact environnemental est très élevé, compte tenu d’une artificialisation forte et de nombreuses zones humides et de réservoirs de biodiversité affectés.

Des mesures sont envisagées, telles que des voies réservées, de façon à contenir l’augmentation, prévisible à défaut de telles mesures, de l’usage des véhicules particuliers ; ces dispositions sont essentielles et doivent être prises en compte dans la concession. Le COI a considéré qu’à ce stade de la procédure et dans la mesure où le projet ne mobilise pas de fonds d’Etat il ne lui appartenait plus de se prononcer sur ce projet.

Anne InspireCommentaire